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Michel Barrionuevo -   Sassenage

Là où réside le vrai scandale

13 Juillet 2010, 07:20am

Publié par Patrick Apel-Muller

10-07-13-pujadas-sarkozy.jpgL'édito de l'Humanité du 13 juillet 2010

Nous n’attendions rien de Nicolas Sarkozy. Nous ne sommes donc pas déçus.

Préparé depuis des semaines par une propagande intensive sur deniers publics, son projet concernant les retraites est rendu public dans sa version finale et dans une hostilité très majoritaire. Cette contre-réforme est le point d’orgue d’une politique d’hyperaustérité qui entend démanteler les services publics, supprimer des centaines de milliers d’emplois de fonctionnaires, bloquer les salaires et, ainsi, apurer les dettes nées des « secours » apportés au système financier et aux grandes fortunes. La mesure emblématique, présentée le 16 juin dernier, est le report à soixante-deux ans de l’âge légal du départ à la retraite. Mais, à sa suite, toute une cascade de dispositions met en cause un des acquis majeurs du XXe siècle. « J’ai été élu pour résoudre les problèmes de la France et des Français », s’est rengorgé le président, hier, accompagné par un David Pujadas singulièrement complaisant. Et de quoi peut se targuer Nicolas Sarkozy, sinon de les avoir aggravés ?

L’injustice ! C’est ce qui est sans doute le plus insupportable à nos concitoyens.

Les 500 plus gros patrimoines professionnels – ceux donc des principaux patrons français – ont, selon le magazine Challenge, augmenté de 25 % de 2008 à 2009, en passant de 194 milliards d’euros à 241 milliards. En tête du classement, Bernard Arnault, patron de LVMH (27,7 milliards d’euros), s’apprête à accueillir Mme Chirac dans son conseil d’administration. Deuxièmes du classement, Gérard Mulliez et sa famille (fondateurs d’Auchan, 19 milliards) n’ont pas de grands noms de la droite exposés dans leurs rayons. Pas comme la troisième, cette pauvre Liliane Bettencourt (15,5 milliards) qui a bien des misères avec son petit personnel mais peut compter sur la discrétion de sa gestionnaire de fortune, également épouse du trésorier de l’UMP. Si le président a « bousculé des intérêts », ce ne sont pas ceux-là. « Nous n’avons pas les moyens », a-t-il gémi hier. Tout dépend qui...

Finalement, là réside le vrai scandale, dans ce grand écart entre un peuple à qui l’on ôte ses maigres avantages et une microminorité ultra-fortunée à qui tout est donné comme si tout lui était dû. L’Élysée peut désormais ajouter ses propres épisodes au feuilleton – en diffusant des procès-verbaux de police ou en donnant écho à un rapport de l’Inspection générale des finances qui ne veut rien dire –, ou dépeindre des complots imaginaires, ce n’est pas d’abord cela qui concerne et indigne l’opinion. Ce qui est prouvé, la collusion de chaque instant entre les puissances d’argent et le pouvoir de droite, ne peut plus être occulté. Même des magistrats complaisants n’y parviendraient pas...

Déjà deux ministres sont passés par-dessus bord. Éric Woerth s’accroche, croyant se sauver en abandonnant la trésorerie de l’UMP et ce confortable Premier Cercle, qui réunit les milliardaires abonnés aux finances du parti présidentiel. Au plus bas dans les sondages, Nicolas Sarkozy jette du lest parce qu’il espère ainsi sauver sa réforme des retraites, réclamée avec tant d’appétit par le Medef ! Rendez-vous compte, si même Rambouillet déserte et abandonne l’UMP pour une députée d’opposition !

On pourra aujourd’hui scruter avec plus ou moins de gourmandise ou de haut-le-cœur les dérobades et les faux-semblants que Nicolas Sarkozy oppose à « l’affaire ». Mais c’est ailleurs que va se jouer la période politique qui s’ouvre, au bas des pétitions contre la réforme des retraites, dans le forum géant que ses opposants veulent ouvrir durant l’été, le 7 septembre dans les manifestations syndicales et à La Courneuve, le week-end suivant, pour le plus grand meeting possible contre les menées de l’Élysée.

Patrick Apel-Muller

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