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Michel Barrionuevo -   Sassenage

Agglomération grenobloise - APPEL: Mobiliser tous les acteurs de la Culture

18 Septembre 2015, 19:51pm

Publié par Barrionuevo

APPEL :

MOBILISER TOUS LES ACTEURS DE LA CULTURE POUR REFONDER ET DÉVELOPPER L’ENGAGEMENT DES COLLECTIVITÉS

Le présent appel a pour but, comme son titre le précise, de mobiliser tous les acteurs de la culture pour refonder et développer l’engagement des collectivités territoriales de l’agglomération grenobloise.

La situation de notre pays est préoccupante. Nombre de nos concitoyens souffrent. La santé, l’éducation, la culture, notamment, reçoivent des coups dont on ne mesure pas les conséquences sociétales.

Les initiateurs du présent appel issus de partis et formations du front de gauche, d’élus, ou militants « sans partis » et les signataires, ont pour ambition de mobiliser dans les prochains mois des acteurs de la vie culturelle, au sens large, pour un projet émancipateur pour l’art, la culture en agglomération grenobloise.

C’est une démarche qui complète et soutient la mobilisation syndicale en cours en Isère, contre la baisse des budgets culturels.

Ce texte que nous vous soumettons au débat, à la signature, ne prétend pas être exhaustif.

Nous ambitionnons une agglomération solidaire.

Beaucoup de questions restent à débattre, en particulier celle, très actuelle, des compétences culturelles des différentes collectivités territoriales.

Nombre de nos concitoyens attendent un engagement des formations politiques et de leurs élus pour la CULTURE.

La conclusion de l’appel résume bien notre volonté : « Face aux dégâts du libéralisme et au danger de la démagogie, l’urgence est de faire de l’art et de la culture l’outil essentiel du seul combat qui vaille, celui de l’émancipation humaine »

Nous vous invitons le mardi 22 septembre 2015 à 18h, à Échirolles, au foyer les Écureuils (2, rue Normandie-Niemen), pour une rencontre afin d’échanger sur notre projet mobilisateur et sur les initiatives à mettre en place.

Comme le déclarait un maire d’une grande commune de la MÉTRO (juin 2015), « Nous sommes profondément convaincus que, de notre engagement en faveur de la culture, dépendra notre capacité à construire une humanité qui résiste face à la violence faite aux idées et aux corps, qui défende inlassablement la liberté d’expression et de création. »

Les collectivités assument 70 % des crédits publics à la culture. Or celles-ci vont perdre 11 milliards sur trois ans en dotations de l’État. La disparition déjà massive de festivals, de structures, de lieux, d’emplois n’en est donc qu’à ses débuts…. Voilà ce que nous promet une politique de « rigueur » étroitement managériale, qui d’ailleurs sous-estime le poids économique et social de la « Culture » !

Ne négligeons pas les conséquences dramatiques de disparition de compagnies, associations, équipes de recherche, activités artistiques. Sans négliger cette dimension-là, sociale (pour les artistes et acteurs culturels) autant qu’économique (pour les bassins d’emploi), nous affirmons d’autres ambitions pour la culture, ambitions qui, à elles seules, justifient un engagement fort de l’action publique.

« En Afrique, un vieillard qui meurt, c’est une bibliothèque qui brûle ». De même une association culturelle qui disparaît, un artiste contraint d’arrêter sa pratique professionnelle, une école de musique qui ferme, un éditeur et une librairie de moins, un festival qui disparaît, ce sont autant d’éléments qui contribuent à l’effondrement d’un pays. Car la « culture » inclut toutes ces dimensions de la recherche humaine qui contribuent à la réflexion sur notre commune humanité et à son invention continuée : histoire, sciences « dures » ou humaines, techniques, philosophie,… autant de disciplines qui, à côté des arts plastiques, des arts très divers de la scène, des tréteaux, et des écrans, des écritures, contribuent à nous mettre en culture.

L’agglomération grenobloise peut d’ailleurs se prévaloir des nombreux équipements, lieux, et salles construits au cours des dernières années sur deniers publics. Ces lieux répondent à une demande sociale de maillage et de proximité qui est légitime; ils ne sont pas trop nombreux puisqu’ils ne suffisent pas à répondre aux propositions qui émanent des artistes et acteurs culturels, comme aussi des associations qui nourrissent les débats de la cité.

  • Développer une culture de l’humain

Nous sommes confrontés à la dictature sur les esprits et les corps d’un néo-libéralisme qui use du divertissement et plus généralement de la séduction pour mieux nous assujettir et ainsi garantir la croissance infinie des profits concentrés entre les mains des plus riches - le « 1 % » identifié par Joseph Stiglitz -, et qui ne conçoit au mieux les œuvres culturelles dans leur diversité que comme des produits que n’épargnerait pas le projet TAFTA de libre-échange entre les États-Unis et l’Union européenne (note 1). Nos possibilités d’émancipation, tant individuelles que collectives, ne résident que dans la « culture » de l’humain en chacun de nous et par là-même dans la cité, et cela passe par une prise en charge collective.

C’est pourquoi les politiques culturelles publiques constituent le socle de toute politique qui vise à l’émancipation.

  • Face à l’impérialisme de l’événementiel, le partage dans la durée…

Qui dit culture dit travail dans la durée, et partage, et non priorité à l’événementiel (note 2). Les équipes artistiques, les acteurs culturels doivent bénéficier de contrats suffisamment longs en résidence. Qui dit culture dit refus de l’enfermement dans les champs clos que pourrait permettre la légitime autonomie du créateur. Qui dit culture dit réflexion sur les allers retours possibles entre les artistes professionnels, leurs œuvres et les publics ou les pratiquants amateurs, partages d’expériences sensibles, d’émotions, de points de vue, de langages, en vue d’un enrichissement mutuel. L’œuvre ne naît pas d’un esprit désincarné, atemporel, ne survit pas dans un air raréfié ; le public n’en nourrit son expérience, son imaginaire, sa créativité dans de multiples dimensions, et éventuellement pour créer lui-même, que s’il ne les « consomme » pas. Son esprit critique doit s’enrichir de ces contacts durables et renouvelés. À chacun d’oser l’insurrection dans et par les langages que proposent les arts. Développer par ces échanges l’expression de chacun, notamment verbale, c’est donner à chacun la possibilité de sortir du repli sur soi et d’entrer dans les contradictions du monde; c’est donner à chacun une liberté et une meilleure estime de soi.

  •  Aiguiser les valeurs démocratiques

C’est dire aussi si la disponibilité du public est importante, si le temps gagné sur le temps de travail pour la libre activité – à l’inverse du « travailler plus pour gagner plus » - autant que la lutte pour le pouvoir d’achat (et le pouvoir de payer le prix, même minimum, des entrées…) participent au combat pour une culture partagée orienté par la recherche d’une culture commune. Cette responsabilité du politique est décisive dans un autre combat, celui qu’il faut mener pour que vivent les valeurs démocratiques, car la culture n’est pas seulement un moyen d’aiguiser les sens : elle contribue à ouvrir les esprits à des perceptions nouvelles puisque les artistes ont souvent été et demeurent des éclaireurs d’avenir.

L’invention de notre société par elle-même en serait, en ces temps de panne, grandement stimulée.

  • Favoriser les « embrayeurs »

Si les enseignements artistiques proprement dits relèvent de l’Éducation nationale (qui ne leur donne qu’une portion congrue), les collectivités en charge des établissements scolaires doivent soutenir par le maximum de dispositifs (comme il est déjà fait avec les chèques et « pass » divers), les démarches, notamment collectives, qui permettent aux jeunes l’accès à des sorties culturelles, en s’appuyant sur les enseignants, en soutenant les associations d’éducation populaire (éducation du peuple par le peuple) plutôt que de subventionner au coup par coup de simples « projets ». L’ambition étant de ménager le maximum d’« embrayeurs », dispositifs à même de réduire la distance et l’inégalité : l’utilisation transversale des antennes de service public (maisons des habitants, maisons des jeunes et de la culture, établissements d’enseignement, conservatoires, maisons de retraites…) pour proposer, préparer, faciliter la découverte de propositions culturelles dans des établissements dans et hors du quartier, ou de la commune.

L’abondance de l’offre ne garantit pas, on le sait, un égal accès.

Cette trop réelle inégalité d’accès au capital symbolique que constituent les biens culturels, quelle qu’en soit la source, ne signifie pas que les œuvres inégalement accessibles - qu’elles appartiennent au patrimoine ou qu’elles soient œuvres de création contemporaine - doivent être stigmatisées comme étant « élitistes ». Au contraire, là est la responsabilité de la puissance publique et des acteurs culturels de donner toutes les clés nécessaires à la réception de l’œuvre, de favoriser l’intervention des acteurs culturels.

Partageons les expériences publiques, associatives, institutionnelles qui ont contribué et contribuent à l’éducation populaire, l’enseignement artistique, l’élargissement des publics, l’accroissement des pratiques artistiques, intellectuelles et culturelles, pour gagner des avancées dans la démocratie culturelle.

La politique culturelle de l’agglomération doit mobiliser l’ensemble des citoyens.

Mobilisons-nous pour la culture, sans l’opposer aux autres priorités sociales et sans que les territoires se mettent en concurrence.

  • Diversification, circulation, émancipation

Il convient d’être attentif à toutes les propositions de secteurs en marge des lieux institutionnels, qui procèdent d’initiatives privées, solidaires, qui ont du mal à survivre, d’acteurs nouveaux qui inventent et perfectionnent pour le bénéfice de tous leurs propres formes d’expression. Il s’agit de ne pas reléguer ces formes hors du champ de la culture « légitime », alors qu’il y a là des voies possibles d’émancipation.

À cette fin, diversifions les circuits de la reconnaissance.

La culture commune doit être fondée sur la liberté de chacun de construire son identité, de ne pas se voir assigner telle ou telle identité, et elle doit s’enrichir des riches métissages que permettent la circulation des artistes et le métissage des populations elles-mêmes. Ainsi la musique a depuis longtemps donné l’exemple de ces emprunts multiples, les musiques savantes se sont nourries il y a longtemps déjà des musiques populaires, étrangères, de leurs rythmes et sonorités savants, inouïs, « exotiques ».

C’est pourquoi il est essentiel de favoriser une large circulation des artistes, des œuvres et des événements culturels.

Face aux dégâts du libéralisme et au danger de la démagogie, l’urgence est de faire de l’art et de la culture l’outil essentiel du seul combat qui vaille, celui de l’émancipation humaine.

Les initiateurs de cet appel :

Luc BOUCRIS, professeur émérite des Arts du spectacle; Marie-Odile BOUCRIS, professeur retraitée de Lettres, militante syndicale; Brice DI GENNARO, adjoint à la Culture et aux NTIC de la ville de Fontaine; Jean-Claude LAMARCHE, PCF, syndicaliste, plasticien, responsable de la rubrique Culture du Travailleur Alpin; Jacqueline MADRENNES, Pour une Alternative à Gauche, adjointe à la Culture de la ville d’Échirolles; Isabelle MÉTRAL, Pour une Alternative à Gauche, militante pour « l’insurrection poétique »; Édouard SCHOENE, militant syndical et associatif, ancien adjoint à la Culture; Cosima VACCA, adjointe à la Culture de la ville de Saint Martin d’Hères.

Les premiers signataires de cet appel :

Paule-Catherine ARNAUD-DREYFUS, directrice d’association culturelle ; Nizar BARAKET, militant culturel, conseiller municipal de Fontaine ; Michel BARRIONUEVO, conseiller municipal communiste de Sassenage; Gérard BECK, PAG38 ; Serge BIESSY, musicien ; Yannick BOULARD, ancien maire de Fontaine ; Heiko BUCHHOLZ, acteur, auteur de spectacles de rue et de sciences ; Georges CLAVERI ; Chantal CORNIER, présidente de la REPAC (Régie artistique et culturelle La Rampe-La Ponatière) et présidente du Centre du Graphisme Echirolles ; Robert COUVREUR ; Annie DAVID, sénatrice de l’Isère ; Arnaud DULAT, Chargé des relations publiques/médiation La Source, Fontaine ; Khadra GAILLARD, conseillère départementale ; Pierre GAUDU, artiste peintre/photographe ; Bernard GUILLAUDIN, syndicaliste, militant culturel sciences et techniques ; Sylvie LOYAU, militante associative Culture et Solidarité ; Salvatore ORIGLIO, musicien ; Élisabeth PEPELNJAK, enseignante retraitée, ancienne adjointe au maire St-Martin-d’Hères ; Luc QUINTON, plasticien, colleur d’histoires ; Michel RAHON, militant associatif ; Martine REY, artiste ; Jacky ROCHER ; Claudine SALLENAVE, artiste plasticienne ; Henri THOMAS, comédien, metteur en scène ; Sylvie TRUC, conservatrice de bibliothèque retraitée ; Patrice VOIR, conseiller régional Front de Gauche ; Michèle WATTEZ, chorégraphe et danseuse, Diego ZACCARIA, directeur du Mois du graphisme d’Échirolles, …

Notes

1- Le projet d’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les États-Unis (TAFTA) actuellement discuté dans la plus grande opacité, est lourd de menaces pour le secteur de la culture. Sa philosophie : accorder la toute-puissance aux entreprises face aux États. Il ouvre la porte aux abus en matière de brevets et de droits d’auteurs, remet en cause le droit de préemption des musées, les quotas de diffusion sur les chaines de télévision, les subventions et règlementations particulières des États, …

La France se targue d’avoir obtenu, au nom de l’exception culturelle, l’exclusion de l’audiovisuel des négociations. Mais elle a accepté, avec la Commission européenne, la possibilité d’un mandat complémentaire pour inclure les services audiovisuels … Aucun danger n’est écarté !

2- « Quelle humanité voulons-nous être ? Un projet pour l’art, la culture et l’information du front de gauche » [Avril 2012]. Texte complet sous http://culture.pcf.fr/21066

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